Gliome: «Osez venir chercher du soutien!»
L’oncologue Pierre-Yves Dietrich a repris la présidence de la Ligue genevoise contre le cancer. Dans un contexte de chronicisation des cancers, il considère qu’elle sert de plus en plus à orienter les patientes et les patients vers les structures de soutien associatives ou étatiques.
Quels sont les défis des personnes vivant avec une tumeur cérébrale (gliome)?
Prof. Pierre-Yves Dietrich: Les tumeurs cérébrales occupent une place à part en oncologie. Bien qu’elles partagent des traits communs avec les autres cancers, elles se distinguent par leur diversité: certaines tumeurs, bénignes, se traitent par chirurgie ou surveillance, tandis que d’autres, comme le glioblastome, restent redoutablement agressives et posent des défis thérapeutiques majeurs. Les conséquences de ces maladies varient considérablement selon leur nature et leur localisation. Les symptômes sont donc variés: paralysie, troubles sphinctériens, perte de la lecture ou du langage, désorientation, ou encore modifications du comportement. La particularité principale est que ces tumeurs attaquent le cerveau, organe central de l’identité et de la personnalité. Les patientes et les patients, ainsi que leur entourage, font ainsi face non seulement à une maladie le plus souvent létale, mais aussi à des changements de la personnalité ou des fonctions cognitives.
Précisément, comment cette maladie affecte-elle les proches?
Dietrich: Les tumeurs cérébrales, comme toute maladie oncologique, vont induire des conséquences sur l’équilibre d’une famille, qu’il soit financier, émotionnel ou relationnel. Tout est chamboulé, les modes de fonctionnement préalables s’effondrent. C’est difficile pour le couple, mais aussi pour les enfants, qui nécessitent parfois une prise en charge psychologique. Heureusement, depuis une dizaine d’années, le rôle de proche-aidant et de la famille est mieux reconnu par les équipes de soins, l’État et le monde associatif. Cela va d’une aide aux devoirs pour les enfants, à une prise en charge temporaire de la personne malade, en passant au soutien administratif. À la Ligue, nous réservons le même accueil aux personnes malades qu’à leurs proches. Les besoins de ces derniers varient beaucoup en fonction de la situation personnelle. Il faut souligner que, la plupart du temps, ils parviennent à gérer cette situation de manière extraordinaire.
Ne pas hésiter à aller dans les organisations qui sont là pour soutenir. Parce que le réseau de soins, associatif et étatique est complexe et évolutif, on ne peut pas tout connaître soi-même.
De nombreux patientes et patients ressentent un vide une fois les traitements intensifs terminés. Comment la Ligue facilite-t-elle la transition entre les soins hospitaliers et la vie quotidienne sur le long terme?
Dietrich: En effet, la littérature scientifique souligne un sentiment d’abandon fréquent chez les patientes et les patients une fois la phase aiguë du cancer passée. Certaines difficultés psychosociales n’apparaissent pas pendant les traitements, mais plutôt trois à cinq ans après, avec la chronicisation de la maladie. Face à ces enjeux, la Ligue joue un rôle clé: elle oriente les patientes et les patients, ainsi que leurs proches, vers les ressources adaptées. Chaque situation est unique, il n’existe pas de solution universelle ni de liste standardisée: certaines personnes auront besoin d’informations sur l’assurance invalidité, d’autres d’un coaching professionnel, d’un soutien psychologique, ou encore de conseils en nutrition. Ce suivi psychosocial à long terme s’avère désormais complémentaire au suivi médical.
La Ligue contre le cancer propose aussi des groupes de paroles. En quoi cela soutient les personnes?
Dietrich: Nous proposons de nombreux groupes de paroles pour les personnes malades ou leurs proches. Les thématiques sont variées, focalisées sur les types de maladies, de situations ou de traitement. Elles sont en général identifiées par nos équipes. Nous avons créé par exemple un groupe spécial pour les hommes, qui a du succès. Certains participants, jusque-là réticents à parler de leur maladie ou de leurs problèmes, y ont trouvé un espace pour se sentir moins seuls. Une autre action de la ligue est consacrée à la médiation familiale. Le cancer peut en effet générer beaucoup de conflits dans les familles. L’effet de ces séances peut être extraordinaire pour les apaiser et ramener de l’harmonie.
Quel message souhaiteriez-vous adresser aux personnes vivant avec un gliome?
Dietrich: Si j’ai un seul conseil à formuler, c’est de ne pas hésiter à aller dans les organisations qui sont là pour soutenir. Parce que le réseau de soins, associatif et étatique est complexe et évolutif, on ne peut pas tout connaître soi-même. Or il s’avère d’une aide précieuse face au défi de la chronicisation de la maladie. Je constate souvent que les patientes et les patients, tout comme leurs proches, ont peur de déranger le système et peuvent ressentir une certaine pudeur. Ils considèrent qu’ils doivent se débrouiller seuls. Ainsi, ils risquent de passer à côté d’un soutien dont ils pourraient bénéficier. Certaines associations proposent des aides financières, d’autres des activités pour les enfants, des loisirs artistiques, ou encore des séances de médecines alternatives. Cela permet à de nombreuses personnes de se reconstruire. Pour certaines, cela a même transformé leur vie. Malheureusement, ces ressources sont sous-utilisées.
Mon message est donc: osez venir nous voir! À la Ligue, des infirmières et des infirmiers en oncologie vous accueillent, puis vous aident à identifier vos besoins et à trouver des ressources.
Servier soutient la vie avec le cancer et n’a eu aucune influence sur le contenu de cet article.
Date: 21.10.2025
En tant qu’entreprise leader en cardiologie, Servier devient également un acteur important en oncologie. Avec une nouvelle option thérapeutique contre les gliomes en Suisse, Servier s’engage pour le développement et l’accès à des traitements innovants dans les cancers rares ou difficiles à traiter.